Elle était la première romancière kanake et une femme engagée. Le gouvernement collégial calédonien rend hommage à une « femme politique indépendantiste et écrivain kanak de renom international, qui a marqué la vie » de l’exécutif local. Le monde culturel calédonien salue aussi ce lundi l’héritage de son action au sein du gouvernement dont elle a été membre pendant vingt ans de 1999 à 2019, en charge notamment de la culture, de la condition féminine et de la citoyenneté. Elle était à l’origine de la création de plusieurs institutions culturelles comme la Maison du livre, l’Académie des langues kanak, le Salon international du livre océanien (Silo), ou encore le Pôle export de la musique et de la danse (Poemar).
Femme engagée et militante de la cause indépendantiste. Le FLNKS, coalition historique de la lutte kanak, salue « une grande dame de coeur et d’esprit », qui « a lutté de tout temps pour la liberté de son peuple et la pleine souveraineté de son pays ». « Sa bataille de coeur, la défense de la culture et de l’identité kanak », souligne en métropole la ministre française de la Culture, Rima Abdul Malak, qui salue la mémoire d’une « femme fière et généreuse à qui rendre hommage aujourd’hui est un devoir et un honneur ».
Déwé Gorodey (ou Gorodé) est décédée à l’hôpital de Poindimié, sur la côte est de la Nouvelle-Calédonie, a précisé le gouvernement. Née en 1949 à Ponérihouen, dans la tribu de l’Embouchure, c’est en métropole, à Montpellier, que Déwé Gorodey poursuit des études de lettres entre 1969 et 1973 et décroche une licence de Lettres modernes. Elle s’ouvre à la fois à l’écriture et à la politique, s’imprégnant des idées contestataires et de libération de mai 1968.
Une oeuvre enracinée dans la culture kanake
Dès son retour sur son île natale, elle s’engage dans les premiers mouvements indépendantistes kanaks et participe à des actions militantes, qui lui vaudront plusieurs séjours en prison, en 1974 et 1978. Elle participe à la création du Palika (parti de libération kanak, l’une des composantes du FLNKS) en 1976 et compose -derrière les barreaux- son premier recueil de poésie intitulé Sous les cendres des conques.
Nouvelles et aphorismes se succèdent, une pièce de théâtre (Kënâké 2000), et un roman en 2005, L’Epave, le premier roman kanak jamais publié dans lequel cette féministe engagée brise le tabou des abus sexuels et des violences faites aux femmes. Un autre roman suivra, Graine de pin colonnaire (2009) et en 2012, une vaste fresque sur l’histoire de la Nouvelle Calédonie dans laquelle elle convoque tout l’univers de la culture kanake. Tado Tado wee, pour laquelle elle sera invitée au festival Etonnants Voyageurs de Saint-Malo.
« Déwé Gorodey nous laisse une remarquable oeuvre littéraire. En 2008, Jean-Marie Gustave Le Clézio, recevant le prix Nobel de littérature, l’associait à d’illustres auteurs français, ultramarins ou internationaux qui l’ont accompagné dans son chemin d’écriture », a rappelé Gilbert Bladinières, son éditeur en Nouvelle-Calédonie.
RFI via CONGO PUB Online