La célèbre usine à thé de Lemera, située dans le territoire de Kalehe au Sud-Kivu, a été entièrement démantelée par les combattants de l’AFC-M23 lors des violents affrontements du vendredi 6 juin dernier. Selon des sources locales, les rebelles ont emporté l’ensemble du matériel de production vers une destination inconnue, mettant ainsi fin à plus d’un demi-siècle d’activité industrielle.
Fondée à l’époque coloniale, cette usine représentait le dernier vestige d’une activité industrielle florissante dans la région. Elle transformait chaque année des tonnes de feuilles de thé en produits finis, commercialisés aussi bien sur le marché local qu’à l’international. Ses machines modernes et ses engins spécialisés en faisaient un modèle de développement agro-industriel dans cette partie du pays.
La disparition brutale de cette unité de production plonge toute la région dans une profonde détresse économique. Environ cent familles, dont les membres travaillaient à l’usine, se retrouvent du jour au lendemain sans revenus. Les conséquences se font déjà sentir sur l’économie locale, privée des retombées financières importantes que générait cette activité.
Ce pillage systématique intervient dans un contexte sécuritaire particulièrement dégradé. Depuis janvier 2025, le territoire de Kalehe subit de plein fouet les conséquences de la reprise des activités rebelles. Les affrontements récurrents entre les combattants du M23 et les groupes d’autodéfense locaux, les Wazalendo, ont fini par avoir raison de cette infrastructure économique majeure.
Les autorités provinciales et nationales dénoncent un acte de sabotage économique délibéré. « C’est bien plus qu’un simple pillage, c’est la destruction programmée de notre tissu économique », a déclaré un responsable local sous couvert d’anonymat. La perte de cette usine, dernier fleuron industriel de la région, laisse présager une aggravation de la crise humanitaire dans cette zone déjà fortement éprouvée par les conflits armés.
Les spécialistes du développement rural s’alarment des conséquences à long terme de cette destruction. Outre les emplois directs perdus, c’est toute une filière économique qui s’effondre, avec des répercussions sur les petits producteurs de thé de la région. La relève des activités semble compromise à moyen terme, même en cas de retour au calme, tant l’ampleur des dégâts matériels est importante.
Cette nouvelle tragédie économique vient rappeler l’urgence d’une solution durable à la crise sécuritaire qui mine l’Est de la RDC depuis des décennies. Elle souligne également la nécessité de protéger les infrastructures économiques vitales pour les populations civiles, premières victimes de ces conflits à répétition.
Par Marc Etumba, correspondant à Kinshasa
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