Le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, est intervenu auprès de la Cour constitutionnelle pour rappeler les dispositions relatives à l’immunité parlementaire dans le dossier judiciaire concernant l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo. Cette démarche intervient alors que le parquet a requis 20 ans de prison contre l’ex-chef du gouvernement dans l’affaire du parc agro-industriel de Bukangalonzo.
Dans une correspondance adressée au président de la Cour constitutionnelle, Dieudonné Kamuleta, Vital Kamerhe a invoqué l’article 107 de la Constitution qui encadre strictement les poursuites contre un parlementaire en exercice. Le texte fondamental prévoit notamment qu’aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi ou arrêté sans l’autorisation préalable de l’Assemblée nationale, sauf en cas de flagrant délit.
« L’honorable Matata Ponyo est poursuivi et jugé sans que ses immunités n’aient été préalablement levées », a souligné le président de la chambre basse du Parlement. Tout en réaffirmant son attachement à la lutte contre l’impunité, Kamerhe a insisté sur le respect de ce « verrou constitutionnel » garantissant l’inviolabilité des représentants du peuple.
Cette prise de position intervient à quelques jours du verdict attendu le 14 mai dans le dossier Bukangalonzo, où Matata Ponyo est accusé d’avoir détourné près de 200 millions de dollars destinés à un projet agricole durant son mandat de Premier ministre (2012-2016). La défense de l’ancien chef du gouvernement a déjà contesté la légitimité de la cour chargée de ce dossier.
L’intervention de Vital Kamerhe suscite des réactions contrastées dans la classe politique et l’opinion publique. Certains y voient une nécessaire défense des principes constitutionnels, tandis que d’autres dénoncent une tentative de protection des « intouchables » du système. Le dossier Matata Ponyo fait écho au scandale des « 100 jours » impliquant Kamerhe lui-même, les deux affaires ayant selon les estimations fait perdre plus de 400 millions de dollars à l’État congolais.
La balle est désormais dans le camp de la Cour constitutionnelle, qui doit se prononcer sur cette requête tout en préservant l’indépendance de la justice. Ce dossier sensible met en lumière les tensions persistantes entre les principes d’immunité parlementaire et les impératifs de lutte contre la corruption au plus haut niveau de l’État.
Par Marc Etumba, correspondant à Kinshasa
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