Dans une allocution solennelle diffusée ce vendredi 23 mai 2025, l’ancien président de la République démocratique du Congo (2001-2019) a présenté une analyse approfondie de la situation du pays, assortie de propositions concrètes. Retour sur les principaux axes de cette intervention marquante.
État des lieux : un pays en régression
L’ancien chef de l’État a dressé un constat sévère de la situation nationale, estimant que « le pronostic vital de la nation est engagé ». Il a souligné plusieurs domaines de préoccupation :
Sur le plan politique, Joseph Kabila a dénoncé « une dérive dictatoriale caractérisée par la concentration de tous les pouvoirs entre les mains d’un seul homme ». Il a cité plusieurs exemples, dont « le coup d’État institutionnel de décembre 2020 » et « le simulacre des élections de décembre 2023 ».
La situation sécuritaire a été décrite comme « plus que préoccupante », avec « l’abandon du monopole de la violence légitime par l’État » au profit de « bandes de mercenaires et de milices tribales ». L’ancien président a particulièrement insisté sur la situation dans l’Est du pays, déplorant que « le sang de nos compatriotes coule abondamment ».
Analyse des causes : une gouvernance en échec
Joseph Kabila a identifié plusieurs facteurs expliquant selon lui cette dégradation :
« L’ivresse du pouvoir sans limite » a été pointée comme principale responsable, conduisant à « des remises en cause systématiques des acquis institutionnels ». L’ancien président a critiqué « une justice instrumentalisée » et « un Parlement réduit à une chambre d’enregistrement ».
Sur le plan économique, il a dénoncé « une gestion hasardeuse » marquée par « un endettement public galopant » dépassant les 10 milliards de dollars, et « une corruption atteignant des niveaux inédits ». Malgré l’augmentation des recettes, « aucun investissement structurant n’a été réalisé ».
Propositions : un pacte citoyen en 12 points
Face à cette situation, l’ancien président a présenté un programme de redressement articulé autour de douze mesures prioritaires :
- La restauration de l’État de droit et des libertés fondamentales
- La fin immédiate des hostilités dans l’Est du pays
- Le rétablissement de l’autorité de l’État sur tout le territoire
- La réconciliation nationale et la reconstruction de la cohésion sociale
- La relance économique par une gestion orthodoxe des finances publiques
- Le rétablissement du dialogue avec les pays voisins
- La neutralisation de tous les groupes armés
- L’élimination du mercenariat conformément aux conventions internationales
- Le retrait des troupes étrangères du territoire national
- La restauration de la crédibilité internationale du pays
- La relance des institutions démocratiques
- La répartition équitable des ressources nationales
Positionnement politique : un appel à l’union sacrée
Se présentant en rassembleur, Joseph Kabila a lancé « un appel solennel à tous les Congolais » pour « un sursaut patriotique ». Il a insisté : « Le Congo appartient à tout son peuple, pas à un régime ou à une personne ».
L’ancien président a réaffirmé son attachement à la Constitution de 2006 et au Pacte républicain de Sun City, tout en dénonçant « les tentatives de falsification de l’histoire » par le pouvoir actuel.
Réactions et perspectives
Ce discours intervient dans un contexte politique particulièrement tendu, au lendemain de la levée de l’immunité parlementaire de l’ancien président par le Sénat. Les analystes y voient à la fois une réponse à cette décision et une tentative de repositionnement sur l’échiquier politique national.
La référence constante aux mécanismes régionaux de paix (Pacte des Grands Lacs, Accord-cadre d’Addis-Abeba) et aux instruments juridiques internationaux semble destinée à donner une assise institutionnelle à ses propositions.
un moment clé de la vie politique congolaise
Par cette intervention, Joseph Kabila opère un retour remarqué sur la scène politique nationale. Tout en critiquant sévèrement l’action du gouvernement, il se présente en garant des institutions et en défenseur du bien commun.
Le ton mesuré mais ferme de l’allocution, son ancrage dans le droit international et les textes fondamentaux de la République, ainsi que la proposition d’un programme structuré, marquent une volonté de se positionner au-dessus des clivages partisans.
La suite dépendra des réactions qu’elle suscitera au sein de la classe politique, de la société civile et de la communauté internationale, à un moment où la RDC fait face à des défis multidimensionnels sans précédent.
Par Marc Etumba, correspondant à Kinshasa
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