Ces commémorations des 80 ans de la guerre mondiale ont été placées, comme les éditions précédentes, sous le signe de la filiation directe avec la guerre russe en Ukraine. Mais Vladimir Poutine a aussi pris soin de ménager chacun de ses alliés et partenaires importants du moment, et notamment la Chine, les États-Unis et la Corée du Nord.
Sur la place Rouge aux côtés de Vladimir Poutine étaient présents ses alliés du moment, de l’Asie à l’Afrique en passant par l’Amérique latine, mais le Kremlin n’a quasiment pas pu élargir. Pour célébrer les 80 ans de la victoire contre l’Allemagne nazie, aucun représentant – ou presque – des alliés de l’époque à l’ouest, à l’exception notable, parmi les membres de l’Union européenne du Premier ministre slovaque, n’étaient présents.
Depuis le début de la guerre, jamais le petit écran russe ne s’est montré aussi déterminé à vouloir démontrer que la Russie n’est pas isolée. Une présentatrice de la télévision d’État a ainsi comparé les tribunes et le défilé au sommet des Brics à Kazan. Et tant pis, si, en réalité, le cercle était vraiment bien moins large – le Premier ministre indien Narendra Modi était par exemple absent -. Pour le pouvoir, il fallait montrer à l’opinion public le plus de dirigeants possibles,« malgré l’ignorance de l’ouest », a ainsi insisté un commentateur, « le centre de la diplomatie est au Kremlin ».
11 500 soldats ont défilé sur la place Rouge, selon les chiffres donnés par l’agence étatique Tass. Parmi eux, des soldats de 13 pays ont aussi pris part à la parade comme la Chine, le Vietnam, la Birmanie et l’Égypte. Aucun Nord-Coréen n’a battu le pavé moscovite sous les yeux d’un Xi Jinping qui n’a jamais été aussi proche de son homologue russe, mais qu’on sait aussi soucieux de voir Pyongyang récolter de nombreuses contreparties au renforcement de ses liens militaires avec Moscou. Leur présence, discrète, était dans les tribunes. Mais Vladimir Poutine est venu les saluer à la fin du défilé.
Comme en 2023 et 2024, des soldats russes combattants en Ukraine étaient aussi présents dans le défilé et abondamment honorés dans les commentaires des médias légitimistes. Ils étaient 1 500, selon les chiffres officiels. Manière pour le chef de l’État russe de souligner encore et toujours son narratif assimilant la Seconde Guerre mondiale et la guerre en Ukraine. Autre manifestation de la guerre menée par les soldats de Vladimir Poutine, les armes qui ont été montrées sur la Place Rouge : les drones iraniens Geran et les russes Lancet qui déferlent sur l’Ukraine depuis presque deux ans.
L’ouest, allié de 45 et ennemis d’aujourd’hui, n’a en revanche pas été ciblé dans la traditionnelle courte allocution du chef de l’État russe. Vladimir Poutine a même déclaré : « Nous nous souviendrons toujours que l’ouverture du deuxième front en Europe après les batailles décisives sur le territoire de l’Union soviétique a rapproché la victoire. Nous apprécions hautement la contribution à notre lutte commune des soldats des armées alliées, des participants à la résistance. » Le président n’a pas dit à quels pays il faisait référence. Mais on pouvait lire, dans ces propos, une volonté qu’on lui connaît bien depuis que Donald Trump a pris les rênes de la Maison Blanche : celle de ménager les États-Unis, le seul interlocuteur qui compte à ses yeux. Un geste particulièrement soupesé, dans cette période incertaine où les pourparlers entre Washington et Moscou sur l’arrêt des combats en Ukraine ne donnent pas de résultat visible.
RFI