Alors que les frappes israéliennes se poursuivent au Liban, Haïfa, la plus importante ville du nord d’Israël avec 320 000 habitants, a déjà été visée par plusieurs salves de tirs du Hezbollah depuis dimanche. Les autorités locales et les habitants sont sur le qui-vive.
Le centre de gestion des urgences de la municipalité d’Haïfa ne se trouve plus à la mairie, mais à quelques centaines de mètres, dans des bureaux protégés, en sous-sol, où l’ensemble des services municipaux, soit environ 200 personnes, ont été transférés le 22 septembre dernier. Le lendemain, l’état d’urgence a été décrété dans le nord d’Israël, les écoles d’Haïfa ont donc fermé leurs portes. Les cours sont assurés à distance, par ordinateur.
Dans le centre de gestion des urgences de la mairie a été installée une salle de surveillance avec de nombreux écrans. C’est là qu’arrivent les alertes de bombardements envoyés par l’armée. Le commandement de la « défense passive », la branche de l’armée qui s’occupe de la protection des populations civiles, y a en permanence un représentant, tout comme les différents services de secours, ambulances, pompiers.
Des abris publics anti-bombardements
C’est aussi là que se trouve le centre d’appel que les habitants peuvent joindre pour obtenir des informations, notamment sur la localisation des abris publics disséminés dans la ville, et où il est possible de se réfugier lorsque les sirènes d’alarme retentissent. Des abris conçus en béton armé, généralement souterrains. Ces abris peuvent accueillir entre 50 et 100 personnes. Ils disposent de l’électricité et sont équipés d’un frigo et d’internet.


Une minute pour se mettre à l’abri
Le « Dôme de fer », dispositif anti-missiles de l’armée, intercepte la majorité des projectiles, mais en cas de défaillance, il faut se mettre à l’abri. Et parce qu’Haïfa n’est qu’à une quarantaine de kilomètres de la frontière avec le Liban, il faut aller très vite. « Ce que l’on dit aux habitants, c’est qu’en cas d’alarme, ils ont une minute pour rejoindre une pièce protégée. Chez eux, s’ils en ont une, ou dans un abri public. Une minute, c’est la durée entre la détection du missile et son éventuelle chute sur la ville », souligne Leonid Reznik, le responsable du centre de gestion des urgences de la mairie d’Haïfa.
Les sirènes ont retenti plusieurs fois ces derniers jours à Haïfa. Le 24 septembre au soir encore. Les missiles ont été détruits en plein vol, sans faire de victimes. Mais des débris sont retombés dans certains quartiers, et évidemment le risque demeure permanent. « Nous étions en bord de mer avec mon ami, quand tout à coup, nous avons entendu les sirènes, raconte Talia, danseuse d’une vingtaine d’années. Il y a eu des éclairs dans le ciel, on a vu les projectiles se faire intercepter, des hélicoptères de l’armée ont décollé. On a paniqué, et comme il n’y avait aucun abri anti-bombardement à proximité, on s’est allongés sur le sol. C’est très effrayant ».
Certains habitants refusent de céder à la panique et ne cherchent même pas à savoir où se trouvent les abris. D’autres ne cachent pas leur peur et se préparent, par exemple en faisant des réserves de nourriture ou en installant le nécessaire dans la salle protégée qu’ils ont chez eux. C’est le cas d’Olga Olgoumar, qui tient une épicerie dans le centre-ville. « Nous sommes préparés. Il y a un abri dans notre immeuble, avec de l’eau et les papiers de toute la famille, indique-t-elle. Hier, quand on a entendu les sirènes, on a immédiatement pris les enfants, le chien, et on est descendu. À peine la porte fermée, on a entendu des « boums« . J’ai eu très peur ».
Habitants partagés sur les opérations militaires
L’armée israélienne a annoncé ce 25 septembre « se préparer pour une manœuvre terrestre » au Liban, sans davantage de précision. Parmi les habitants rencontrés à Haïfa, beaucoup soutiennent ces opérations militaires, jugées nécessaires pour la sécurité du pays. Ce sont les partisans de la force, qui expliquent ne pas voir d’autre option.
D’autres se disent attristés par le nombre de victimes au Liban, avec la nouvelle offensive lancée il y a une semaine par les forces israéliennes, ou bien sûr à Gaza, depuis un an. Eux aussi gardent évidemment en tête les attaques du Hamas, qui ont endeuillé le pays, il y a près d’un an. Eux aussi estiment nécessaire de défendre leur pays, mais ils s’interrogent désormais sur la stratégie du gouvernement israélien et sur sa capacité à ramener la paix de cette manière.
« Je ne sais pas si ça va permettre de ramener la paix dans le nord, ni si cela va permettre aux personnes évacuées de rentrer chez elles, explique Talia. Mais je suis tellement triste quand je pense à toutes les victimes là-haut au Liban, aux victimes aussi à Gaza. Le plus triste, c’est que je ne sais pas si nos dirigeants eux-mêmes savent où ils vont, s’ils savent comment sortir de cette crise ».
RFI via CONGO PUB Online