Les sessions de négociations internationales vont se multiplier d’ici à la fin de l’année : COP29 sur le climat à Bakou en Azerbaïdjan, COP16 sur la biodiversité à Cali en Colombie, COP16 sur la désertification à Riyad en Arabie saoudite. Moins connue, une session de discussion aura également lieu fin novembre à Busan, en Corée du Sud, en vue de l’élaboration d’un traité international contraignant contre la pollution plastique.
En 2022, les États du monde entier, réunis à Nairobi, se fixait un objectif inédit : mettre fin à la pollution plastique sur la planète. Quelque 400 millions de tonnes en sont produites chaque année, dont 80% finissent en déchets au bout d’un an, le plus souvent dans les océans. Pour en venir à bout, les délégations présentes à Nairobi s’entendent sur le principe d’un traité international contraignant. Deux ans sont accordés pour le rédiger ; la dernière session de négociation aura lieu en Corée du Sud, lors de la dernière semaine de novembre.
Il n’est cependant pas certain qu’elle aboutisse, tant les positions entre deux blocs de pays divergent. D’un côté, les principaux pays producteurs estiment qu’il ne faut traiter l’enjeu que sous le prisme des déchets, par la mise place de filières de collecte, de traitement et de recyclage. De l’autre, une coalition dite « de haute ambition » plaide pour un travail en amont, en limitant la production.
However, these commitments could be reversed if former President Donald Trump, who opposes stringent climate and environmental regulations, is re-elected pic.twitter.com/suYRu7blD4
— Speak4Nature (@Speak4Nat) August 14, 2024
L’annonce du gouvernement Biden arrive avant la dernière ronde de négociations pour un traité visant à mettre fin à la pollution par le plastique, qui doit commencer à Busan, en Corée, le 25 novembre.
Les États-Unis évoluent
Surprise, Reuters révèle que les États-Unis, pourtant deuxième producteur mondial, évoluent sur la question et sont prêts à discuter de cette baisse de production. Le pays se tenait jusqu’alors sur une ligne conjointe avec l’Arabie saoudite poussant le traité à se concentrer sur la question du recyclage, laissant celle de la production à l’initiative locale des pays.
« On voyait la position américaine avancer », explique Andres del Castillo, du centre de droit international pour l’environnement. « Quand le président Biden s’est rendu en France il y a quelques mois, les deux pays ont signé une déclaration où ils reconnaissaient le besoin de s’attaquer à la production, mais au niveau local, pas mondial. C’est un processus progressif qui a permis d’aboutir à cette nouvelle position des États-Unis. »
Le juriste l’explique en partie par la campagne présidentielle qui se tient en ce moment dans le pays. « On aura besoin de plus de détails de leur part. On pense qu’il y a une part d’évolution de cette position qui tient à la diplomatie internationale, et notamment celle de la France, qui fait partie de la coalition de haute ambition. Mais il y a également un côté électoral. C’est un choix politique. L’administration Biden a mis les questions climatiques et environnementales très haut dans l’agenda. Il y a enfin le constat qu’aucune mesure adoptée n’aura d’effet si on ne contrôle pas la production qui devient hors de contrôle. » D’ici 2027, plus de 1 400 nouvelles installations de production doivent être mises en service dans le monde.
Si cette nouvelle position américaine ravit les défenseurs de l’environnement, elle a en revanche provoqué la colère des producteurs locaux. L’American Chemistry Council (ACC), principal lobby du secteur, a ainsi estimé que la Maison Blanche avait « cédé devant les ONG extrémistes », et qu’elle était sur le point de « trahir l’industrie américaine ». Son président met déjà en garde : il fera tout pour que le Sénat bloque une éventuelle entrée en vigueur si jamais le traité final reste sur cette ligne.
Des négociations toujours compliquées
Se pose donc également la question du contenu de ce futur traité, car si le revirement américain est capital, beaucoup reste à faire pour trouver un terrain d’entente. La précédente session de négociation a en effet été très compliquée, l’Union européenne – membre de la coalition pour une haute ambition – accusant même certains pays de « jouer la montre », et qu’il sera « très compliqué » d’obtenir un succès à Busan, en Corée du Sud. En cause, pour l’Union : « Les principaux pays producteurs de pétrole » ; le plastique étant en effet réalisé à partir d’hydrocarbures. Il est ici fait référence à la Russie et à l’Arabie saoudite, qui ont été accusées de vouloir « pourrir » le débat.
Traité sur la pollution #plastique: Paris craint un parasitage par la géopolitique, lors des négociations internationales d'Ottawa du 23 au 29 avril, puis de Busan (Corée sud) du 25 novembre au 1er décembre.#Onu #environnement #industrie #déchets #santé https://t.co/CNbAwZNlwv.
— IsabelMalsang-Salles (@IsabelMalsang) April 18, 2024
« La nouvelle position des États-Unis sera donc très importante », anticipe Andres Del Castillo. « Étant donné leur influence, cela isole un peu plus l’autre bloc. Par ailleurs, si le traité introduit des clauses de commerce, il sera important pour de nombreux pays d’en faire partie avec les États-Unis, s’ils souhaitent y commercialiser leurs produits. »
Ces deux années intenses de négociations s’achèveront donc sur un rendez-vous à Busan plus ouvert que jamais, du 25 novembre au 1er décembre prochain. Tout accord qui y serait obtenu sera ensuite signé lors d’une grande conférence quelques mois plus tard.
RFI via CONGO PUB Online