Le samedi 22 mars 2025, l’aviation des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) a mené des frappes de précision sur l’aérodrome de Kigoma, situé à Walikale-centre, dans la province du Nord-Kivu. Cette infrastructure, utilisée par les rebelles du M23 comme base logistique pour leur ravitaillement et l’évacuation de leurs blessés, a été sévèrement touchée. Ces frappes, qui ont infligé des pertes importantes aux rebelles, ont contraint le M23 à annoncer, dans un communiqué, son retrait de Walikale « de bonne foi » et en « respect du cessez-le-feu ».
Cependant, cette annonce suscite scepticisme et interrogations. Pour de nombreux observateurs, ce retrait serait davantage motivé par les pertes subies et la pression militaire des FARDC que par une réelle volonté de respecter les accords de paix. En effet, le M23, soutenu par l’armée rwandaise selon les autorités congolaises, a déjà montré à plusieurs reprises sa capacité à ignorer les cessez-le-feu, comme en témoignent les prises successives de Goma, Bukavu et d’autres localités malgré les appels internationaux à la désescalade.
Un cessez-le-feu qui divise l’opinion
Les FARDC ont pris acte du retrait du M23 de Walikale, se conformant à la déclaration conjointe signée le 18 mars 2025 entre la RDC, le Rwanda et le Qatar, qui prévoit une cessation des hostilités et la relance des processus de paix de Luanda et de Nairobi. « Les FARDC vont s’abstenir de mener toute action offensive contre les forces ennemies, tout en enjoignant les forces d’autodéfense congolaises à en faire autant, afin d’encourager la désescalade », indique le communiqué officiel.
Pourtant, cette décision soulève des questions cruciales. Pourquoi les FARDC, après avoir déstabilisé l’ennemi par des frappes aériennes efficaces, ne poursuivent-elles pas leur avantage militaire ? Pourquoi laisser l’initiative à un groupe rebelle qui, malgré ses déclarations, continue d’occuper des zones stratégiques et de menacer l’intégrité territoriale du pays ? L’opinion publique congolaise s’interroge : incompétence, manque de moyens, ou calcul politique ?
Une armée sous pression, une population inquiète
Les populations des zones contrôlées par le M23 vivent dans la crainte permanente, tandis que celles des régions libérées doutent de la capacité des FARDC à les protéger durablement. Le communiqué du M23, qui affirme assurer la sécurité des civils dans les zones sous son contrôle, est perçu comme une provocation par de nombreux Congolais. Comment une rébellion armée peut-elle prétendre protéger les populations alors qu’elle est à l’origine de leur déplacement et de leur souffrance ?
Par ailleurs, la stratégie des FARDC, qui semble se limiter à des communiqués de presse et à des cessez-le-feu unilatéraux, inquiète. Les exemples passés montrent que chaque retrait annoncé par le M23 a été suivi de nouvelles avancées territoriales. Ainsi, après Walikale, les rebelles pourraient se repositionner pour menacer Kisangani, une ville stratégique située plus au nord.
Négocier en position de force, pas de faiblesse
Les experts en stratégie militaire rappellent qu’une négociation ne peut aboutir que si les parties sont en position de force équilibrée. Or, le M23, soutenu par le Rwanda, se considère en position de force et impose ses conditions. Les FARDC, malgré leurs récents succès tactiques, semblent hésiter à exploiter leurs avantages sur le terrain.
Pour beaucoup, il est temps que l’armée congolaise assume pleinement son rôle de défenseur de l’intégrité territoriale. Les frappes aériennes de Walikale ont montré que le M23 n’est pas invincible. Mais sans une stratégie claire et une volonté de poursuivre les opérations jusqu’à la libération totale des zones occupées, ces succès risquent de rester sans lendemain.
L’urgence d’une stratégie cohérente
La situation à Walikale illustre les paradoxes de la crise sécuritaire dans l’est de la RDC. Alors que les FARDC démontrent leur capacité à frapper l’ennemi, leur réticence à exploiter ces succès militaires laisse perplexe. Dans un contexte où le M23 continue de menacer l’intégrité du pays, il est crucial que les autorités congolaises adoptent une stratégie cohérente, alliant pression militaire et dialogue politique, pour rétablir la paix et la souveraineté nationale.
En attendant, les populations du Nord-Kivu, épuisées par des années de conflit, espèrent que cette fois-ci, les promesses de cessez-le-feu seront suivies d’actions concrètes pour leur sécurité et leur bien-être.
Par MN
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