Dans un mouvement audacieux qui confirme son rôle de catalyseur majeur dans le secteur énergétique africain, la Banque africaine d’import-export (Afreximbank) a annoncé le déblocage de 3 milliards de dollars pour soutenir l’achat intra-africain de produits pétroliers raffinés. Une initiative dévoilée ce 7 avril par Kanayo Awani, vice-présidente exécutive de la banque, à l’occasion d’une conférence internationale sur l’énergie tenue au Cap, en Afrique du Sud.
‘’Le temps est venu pour l’Afrique de prendre le contrôle de son destin énergétique », a martelé la dirigeante, donnant le ton d’un changement d’échelle dans les ambitions industrielles du continent.
Un paradoxe énergétique criant
Alors que l’Afrique exporte près de 80% de son pétrole brut et 45% de son gaz naturel, elle reste massivement dépendante de produits raffinés venus d’ailleurs. Résultat : une facture annuelle d’importation de l’ordre de 30 milliards de dollars, selon Afreximbank. Le manque d’infrastructures modernes, l’insuffisance des capacités de raffinage et la vétusté de certaines installations expliquent ce paradoxe énergétique, que la banque entend corriger.
Le plan de financement de 3 milliards de dollars cible des produits stratégiques comme l’essence automobile, le gazole, le kérosène, le carburéacteur ou encore le fioul lourd, avec une priorité donnée aux flux intra-africains. L’objectif est clair : soutenir les productions locales pour sécuriser les approvisionnements, stabiliser les prix et stimuler l’industrialisation régionale.
Afreximbank n’en est pas à son coup d’essai. La banque panafricaine figure déjà parmi les principaux bailleurs de fonds de la mégaraffinerie de Dangote au Nigéria – d’une capacité de 650 000 barils par jour – mais aussi des raffineries angolaises de Lobito et de Cabinda. Au total, ces investissements contribuent à faire émerger un véritable corridor industriel le long du Golfe de Guinée, en passe de devenir le nouveau centre de gravité du raffinage africain.
Au Nigéria, la capacité de raffinage cumulée atteint désormais 1,3 million de barils par jour, illustrant l’impact structurant de ces investissements sur le tissu énergétique régional.
Une réponse à une demande en forte croissance
Selon un rapport publié par le cabinet CITAC et Puma Energy, la demande africaine en carburants propres devrait bondir de 56% d’ici 2040, pour atteindre 142 millions de tonnes métriques. Cette dynamique impose une révision en profondeur des chaînes d’approvisionnement, encore trop dépendantes de marchés extra-continentaux.
Dans ce contexte, l’approche proactive d’Afreximbank s’impose comme une alternative durable, conjuguant souveraineté énergétique, industrialisation et intégration régionale. Une stratégie qui répond aussi aux attentes croissantes des États africains, en quête de partenaires financiers capables de conjuguer impact, résilience et vision à long terme.
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