Kinshasa, 5 novembre 2025 – Le gouverneur de la Banque Centrale du Congo, André Wameso, a présenté une vision audacieuse pour une réorganisation en profondeur de l’économie congolaise, mettant en garde contre la reproduction de schémas économiques défavorables au pays.
« Éviter de labourer la mer »
Lors d’une intervention remarquée, le gouverneur a utilisé une métaphore forte : « Il faut éviter de labourer la mer », illustrant ainsi l’inutilité d’efforts non structurés. Pour lui, l’enjeu est profondément politique : « Notre pays a été créé pour ça, si nous considérons que ça va aller de soi sans pouvoir s’organiser de manière rigoureuse, professionnelle, nous allons continuer à servir les autres tels que cela a été conçu à la Conférence de Berlin. »
Mobiliser l’épargne nationale
Le cœur de la stratégie défendue par André Wameso réside dans la canalisation de l’épargne des Congolais vers le financement de l’économie nationale. Il a présenté des calculs concrets :
- Prélèvement de 5% sur la masse salariale de l’État (400 millions USD/mois) : 20 millions USD/mois
- Institutionnalisation des corporations (taximen, etc.) : objectif de 50 millions USD/mois
- Soit une capacité d’épargne annuelle potentielle de 600 millions de dollars
Capitaliser sur le dividende démographique
Le gouverneur a mis en avant le potentiel de la jeunesse congolaise : « Heureusement, 70% de la population a moins de 25 ans. Si on fait un travail pour mettre ne fût-ce que 50% de cette population au travail (…) et si cette trentaine de millions de personnes peuvent cotiser 10 USD par mois, on est à 300 millions. »
Un marché boursier au service du développement national
André Wameso a insisté sur le fait que la création d’un marché boursier ne devait pas être une fin en soi, mais un outil au service du développement national. Il a pointé le risque de voir les bénéfices captés par des investisseurs étrangers : « Qui va en bénéficier ? Ça sera le fond de pension qui se trouve au Luxembourg, Zurich, à Londres, à New-York puisque c’est déjà le cas. »
Rétablir la confiance dans le franc congolais
Le second pilier de cette refonte est le rétablissement de la confiance dans la monnaie nationale, dans un pays où près de 90% de l’économie est dollarisée. « C’est lié à quoi ? À la confiance. On n’avait pas suffisamment confiance au franc », a-t-il reconnu.
Pour inverser cette tendance, la BCC propose la création d’un « système complémentaire des pensions par capitalisation » libellé en francs congolais, ancrant ainsi l’usage et la confiance dans la monnaie nationale.
Cette vision articulée témoigne d’une volonté de construire un marché financier qui soit d’abord et avant tout un levier de souveraineté pour la RDC, en s’appuyant sur ses propres forces avant d’ouvrir les vannes à la finance internationale.
Par Pascal Kabeya
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