Devant les députés européens à Bruxelles, Jean-Jacques Wondo, ancien prisonnier politique en République démocratique du Congo, a brisé le silence sur les conditions de détention inhumaines qu’il a endurées. Son témoignage poignant a révélé les graves dysfonctionnements du système carcéral et judiciaire congolais sous le régime du président Félix Tshisekedi.
Détenu dans ce qu’il qualifie de « geôles militaires totalitaires », il dit avoir été privé de soins, d’accès à l’extérieur et même de sa dignité. Citant le sociologue américain Erving Goffman, il a comparé cette expérience à un mécanisme conçu pour « broyer l’individu ».
Décrivant sa condamnation comme « un acharnement diabolique », Jean-Jacques Wondo a dénoncé un procès dépourvu de toute crédibilité. Il a souligné l’absence de preuves tangibles et les irrégularités flagrantes ayant marqué la procédure. Une critique que le Parlement européen avait lui-même formulée dans sa résolution du 23 janvier.
Lors d’une conférence de presse, Wondo a partagé des détails bouleversants sur son expérience en détention. Il a raconté avoir entendu un gardien de la DEMIAP dire en voyant un détenu décédé : « Ce sont des opposants en moins pour le président Tshisekedi ». Avec émotion, il a décrit avoir assisté, impuissant, à l’agonie du colonel Musuku Suku, officier de la Garde républicaine disparu en détention en 2024.
Le colonel Musuku Suku, arrêté fin 2023, avait été placé à la DEMIAP où tout contact avec sa famille avait été interrompu. Des rumeurs sur sa mort avaient circulé en juin 2024, suggérant que son corps aurait été jeté dans le fleuve Congo. Le témoignage de Wondo vient aujourd’hui confirmer ces craintes, offrant une terrible réponse aux proches du défunt.

Wondo, lui-même arrêté dans l’affaire du putsch manqué de Christian Malanga, a dressé un tableau accablant du système carcéral congolais. Il a dénoncé les conditions insalubres, les maladies qui sévissent, le manque de nourriture et de soins médicaux. Il a également pointé du doigt la politisation de la justice militaire, souvent utilisée comme outil de répression contre les opposants, ainsi que la banalisation inquiétante de la peine de mort.
En réponse à ces violations, Wondo a annoncé la création d’une Fondation pour la défense des personnes incarcérées à l’étranger, marquant ainsi sa détermination à poursuivre son combat pour les droits humains.
Ces révélations ont provoqué des réactions contrastées. Le député Mbala Lumbala a accusé Wondo d’ingratitude, rappelant que sa libération résultait d’une grâce présidentielle accordée par Tshisekedi. D’autres voix se sont élevées pour soutenir Wondo, dénonçant les dérives du régime actuel et prévenant que personne n’échapperait à la justice après 2028.
Wondo a profité de cette tribune pour lancer un appel pressant en faveur de réformes urgentes : l’abolition de la peine de mort, la fin des procès militaires pour les civils, et une profonde restructuration du système pénitentiaire congolais. Son témoignage, aussi douloureux soit-il, porte l’espoir d’une prise de conscience internationale pouvant mettre fin à ces violations systématiques des droits humains.
Alors que la RDC traverse une période politique particulièrement tendue, le récit de Jean-Jacques Wondo rappelle avec force le lourd tribut payé par les dissidents. Entre reconnaissance et accusations, son histoire soulève une question fondamentale : jusqu’où peut aller l’impunité dans un État qui se dit démocratique
La peine capitale prononcée à son encontre de Jean-Jacques Wondo en janvier 2025 avait provoqué une onde de choc en Belgique. Le gouvernement belge, dénonçant une condamnation sans base factuelle, avait rappelé son ambassadeur à Kinshasa et exigé des explications. Depuis, les relations diplomatiques entre les deux pays restent tendues.
L’analyste a attiré l’attention sur des centaines de Congolais enfermés dans des conditions similaires. “Ce que j’ai vécu est le quotidien de milliers d’autres citoyens en RDC”, a-t-il alerté, appelant à une surveillance accrue du respect des droits fondamentaux dans le pays.
Par Basengezi Ntomo, correspondant à Goma
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