La Cour internationale d’Arbitrage de Paris de la Chambre de commerce internationale vient de programmer une audience pour le lundi 16 janvier 2023. L’extrait de rôle est déjà publié. Il s’agit du différend entre la Congolaise d’Exploitation Minière SPRL (COMINIERE ex-ZAIRE ETAIN), une entreprise publique et la compagnie mauricienne MMCS STRATEGIC 1.
MMCS accuse la COMINIERE de résilier son contrat de manière illégale. Elle détenait un permis de recherche et devrait effectuer des études de faisabilité. En février 2016, le ministre des Mines avait annulé le permis de recherche de MMCS STRATEGIC 1 pour octroyer le permis 12202 à DATHOMIR sur le même périmètre. L’arrêté de la déchéance du titre fut signé le 28 septembre 2016. Le ministre reprochait à MMCS STRATEGIC 1 « le manque de résultats et l’absence d’une étude de faisabilité ». La société mauricienne, quant à elle, justifiait le retard d’exécution des travaux par l’insécurité dans le Tanganyika, à Manono et le déficit d’énergie électrique. Mais, pour les experts, l’étude de faisabilité devrait précéder l’étape de l’énergie.
RDC, pays des scandales et de la maffia
DATCOM est une joint-venture entre la COMINIERE et DATHOMIR. Cette dernière est une société non autrement identifiée et sans expérience minière à l’instar de MMCS STRATEGIC 1. La magie du ministre des Mines de l’époque a fait que DATHOMIR soit le nouveau détenteur du titre après la déchéance de celui de MMCS STRATEGIC 1. De DATCOM à DATHOMIR, une vraie alchimie : DATHOMIR avait vendu 60 % de ses parts à l’australien AVZ pour garder 20 % des actions tandis que la COMINIERE détient 20 % des parts sociales dans le projet d’exploitation du lithium de Manono. L’intrusion mystérieuse d’un ancien dignitaire hautement, politiquement et directement connecté au sommet de la pyramide dans l’actionnariat de la JV, est étonnante. Nos sources soulignent que l’homme détiendrait gratuitement 10 % des parts. Un ovni devant une manne tombée du ciel !
Si AVZ a réellement effectué des recherches en allant au-delà de ce que ZAIRE ETAIN avait fait en son temps, MMCS STRATEGIC 1 et DATHOMIR n’ont rien fait. La déchéance du titre à la société x pour l’octroyer à la société y n’était qu’un simple raccourci emprunté par le ministre pour servir des intérêts obscurs.
RDC, pays virtuellement solution et totalement déconnectée des réalités
Combien de Congolais ont une idée sur les rapports 2021 et 2022 de l’Union européenne et des USA sur les métaux critiques ? Parmi ces métaux, le lithium jouera un rôle crucial dans la transition écologique. Le besoin en lithium sera multiplié par 10 d’ici à 2030. Ce métal sera plus recherché que le cobalt. Nos ministres se contentent seulement de dire que « la RDC est un pays solution » parce qu’elle regorge des minerais indispensables aux NTIC. Un simple slogan. Que du folklore ! Personne ne maîtrise les enjeux et ne connaît les acteurs du jeu. Les ressources naturelles n’appartiennent pas aux peuples autochtones, mais plutôt à ceux qui les exploitent, les transforment et en jouissent.
Pendant qu’on assiste depuis un temps, l’Inspection générale des Finances (IGF) se bat pour que l’État rentre dans ses droits après la vente illicite des actifs de la COMINIERE, l’avenir du lithium congolais de Manono se joue en France.
La sous-information et l’inaction sont des épidémies très mortelles en RDC
Depuis 2019, le différend COMINIERE-MMCS STRATEGIC était porté devant la Chambre d’Arbitrage de Paris. Le Cabinet d’Avocats Emery Mukendi WA Nfwana & Associés a été choisi par la COMINIERE pour plaider en faveur de la RDC. Hélas, Maître Emery Mukendi est décédé en 2020 et le Cabinet a été liquidé. Avant la mort de Mukendi, une audience devrait avoir lieu en mars 2020 à Paris mais avec la pandémie de Covid-19 et la fermeture des frontières, la séance fut reportée sine die.
Qui pour défendre la RDC dans ce litige ?
Selon des sources dignes de foi, la COMINIERE qui a contacté quelques avocats, est aujourd’hui incapable de les prendre en charge pour leur séjour à Paris faute de moyens. Les avocats qui, à leur tour, avaient sollicité le concours de certains experts miniers ne peuvent honorer leurs engagements. Ainsi, ni les avocats ni les experts ne peuvent effectuer le déplacement de Paris pour plaider en faveur de la RDC.
Alors que MMCS a mobilisé de coriaces cabinets d’avocats, de costaudes équipes et des moyens conséquents pour les plaidoiries qui dureront plusieurs semaines. À cet effet, l’État propriétaire de la COMINIERE risque d’être condamné par défaut. En cas de condamnation, la RDC paiera des millions voire des milliards aux gens qui n’ont pas investi au pays. Quel gâchis ? Où sont les ministres des Mines et de la Justice ? Le gouvernement est-il au courant de ce dossier ? Un dossier en arbitrage au niveau international n’est pas un jeu de loterie. C’est une grande bataille judiciaire qui exige une préparation minutieuse avec des experts aguerris. Affaire à suivre attentivement avec intérêt.
Gaby Kuba Bekanga
OURAGAN via CONGO PUB Online